C’était rapidement après son arrivée que Kathleen avait pris des fonctions de diplomate auprès de la mairie, soulageant le maire de la ville de certains échanges compliqués avec les nouveaux venus, dont certains projets étaient à la limite de la légalité. Si elle sentait que son côté bien trop optimiste et un rien fleur bleue pouvait agacer sa supérieure, son professionnalisme et sa capacité à dénouer les problèmes lui avaient valu un degré de confiance certain qui lui permettait d’exercer son nouveau métier avec une certaine liberté, dans la mesure des consignes de la mairie. On ne pouvait accepter tout et n’importe quoi.

Récemment, une nouvelle personne avait été intégrée au personnel de la mairie. Kathleen avait cru comprendre qu’elle était apparentée à la maire. Elle était curieuse de cette personne et elle se demandait quel genre de personne c’était. Elle n’était pas jalouse. Kathleen n’était pas assez au fait de la vie moderne pour avoir en elle des notions comme le piston, et elle avait toujours vécu au milieu de gens qui recevaient des faveurs. Par ailleurs, son innocence la poussait à voir le meilleur de toute situation. Elle avait donc décidé de faire confiance à cette nouvelle personne a priori. Et elle verrait plus tard si elle devait revoir son jugement.

En attendant, le moment était venu de l’accueillir. La jeune princesse, forte de ce qu’elle avait appris depuis un mois sur le monde moderne, était allée acheter des viennoiseries et avait préparé une pleine cafetière de café bien chaud. Quand la jeune femme nouvellement arrivée entra dans la salle de pause réservée aux membres du personnel de la mairie, Kathleen venait de finir de tout installer sur des plateaux. Elle avait au moins le mérite de soigner son accueil. Elle espérait que cela ferait plaisir à la nouvelle venue, et se demandait même si elle ne pourrait pas s’en faire une amie.

« Vous devez être Margot Woods. Bienvenue parmi nous. J’espère que vous vous sentirez bien ici. »

Halloween

Kathleen avait toujours à cœur d’accueillir les personnes avec bienveillance. Il lui avait fallu un peu de temps pour s’habituer aux coutumes du monde moderne. Mais elle avait finalement pris conscience de certaines bases et quand il lui fallait offrir un cadeau, elle avait quelques petites pistes. Préparer un petit-déjeuner pour ses collègues était une base des plus agréables à mettre en œuvre et elle avait pu constater que d’autres personnes avaient déjà fait cela. Elle s’en était inspiré pour accueillir la nouvelle venue. Bien entendu, ce n’était pas quelque chose uniquement pour elle, mais tout le monde en profiterait.

Elle sourit en réponse au formidable sourire de Margot Woods quand celle-ci entra dans la pièce. Elle était contente qu’elle soit la première à être arrivée. Elle pouvait voir tout installé comme Kathleen l’avait voulu. Elle semblait être touchée par l’effort que la jeune diplomate avait fait. Elle ne s’attendait sûrement pas à ce genre d’attention de la part d’une collègue, mais la jeune femme avait à cœur que tout le monde se sente bien et que le travail se fasse en harmonie. Elle savait qu’une bonne ambiance faisait du bien à tout le monde. Mais elle ne pouvait l’enrichir à elle seule.

« Oui, c’est moi. Je m’appelle Kathleen Peacecraft. J’espère que je ne me suis pas trompée en préparant. Je dois reconnaître que je ne suis pas habituée à tout ça. Je suis… d’une autre époque, disons. »

Elle avait affaire à une jeune femme bavarde, mais ça ne la dérangeait pas. Elle était du genre bavarde aussi quand on la laissait faire et pour le moment, c’était plutôt écouter qu’elle faisait. Pendant que son invitée parlait de l’adresse qu’elle aimait et qui était celle que Kathleen avait eue comme référence de la part de ses collègues, l’ancienne princesse alla servir une tasse de café qu’elle apporta à la nouvelle employée. Elle avait très envie de mieux la connaître. La jeune femme se languissait de ses amis et elle avait très envie de s’en faire de nouveaux. Mais ce n’était pas facile en étant aussi décalée.

« Oui, c’est cette adresse, en effet. Certains collègues m’ont dit qu’ils faisaient de bons produits et j’y avais goûté. Je me suis dit que ce serait parfait pour vous accueillir. J’espère que cela vous plaît. »

Elle s’excusa de trop parler, mais Kathleen sourit. Elle n’était pas du genre à en vouloir à quelqu’un de s’exprimer. Même Feena était bien plus bavarde que ne l’étaient les princesses normalement. En revanche, elle n’hésitait pas à répondre avec chaleur à tout ce que l’on pouvait l’inviter à dire. Elle n’aimait pas se cacher, surtout quand il n’y avait rien à cacher de particulier.

« Ne vous inquiétez pas de vos bavardages, je le suis plutôt pas mal moi-même et ça ne me dérange pas. Je suis diplomate à la mairie. J’étais ambassadrice de mon royaume, le Royaume de Sank, dans mon monde. Aussi, c’était un poste idéal pour moi. »

Halloween

Kathleen s’inquiétait toujours de quelle façon elle faisait des choses, surtout compte-tenu du fait que certaines habitudes du monde moderne lui étaient étrangères. Plusieurs de ses amis lui avaient conseillé de rester elle-même en affirmant que sa nature était parfaitement compatible avec le monde moderne, mais elle n'était pas toujours sûre de ce qui se faisait ou ne se faisait pas. Pour autant, elle était persuadée qu'il ne pouvait rien y avoir de mal à accueillir un collègue avec un bon repas. Il y avait bien des choses qui étaient difficiles à adapter à la situation mais la bienveillance n'en était pas une.

Par ailleurs, sa collègue semblait ravie de ce qu'elle avait préparé pour elle et elle alla même jusqu'à affirmer qu’elle s'adaptait parfaitement à la situation pour quelqu'un d'une autre époque. Voilà un compliment qui ne manquait pas d'être flatteur et qui était précieux pour la jeune princesse, compte-tenu des efforts qu'elle mettait à s'adapter de son mieux. Il lui était difficile de se faire à certaines habitudes, comme le fait de confier sa fille à quelqu'un d'autre pendant qu'elle travaillait. Être ambassadrice de son royaume ne l'avait jamais empêché de prendre soin de sa fille en même temps mais cela ne se faisait pas ici.

« Eh bien, avant de me retrouver ici, je vivais à la cour de Marie-Antoinette et Louis XVI, en France, au statut d'invitée royale et ambassadrice de mon pays. »

Elle ne connaissait pas les datations exactes, même si elle savait que c'était une des choses qu'elle allait devoir étudier à un moment ou à un autre pour se repérer et aussi pouvoir répondre aux questions des gens. Mais elle savait que les noms du roi et de la reine de France étaient parlants pour la majorité des gens. Elle avait déjà pu le remarquer. Elle avait eu de la chance qu'une part de sa fortune la suive dans ce monde et lui permette d’avoir un toit et d’offrir un travail à beaucoup de personnes dans le château qu’elle avait choisi pour demeure à l'image du sien.

Elle avait cru comprendre que des personnages de sang royal et provenant de différents pays ou époques étaient arrivés dans cette ville. Si elle avait eu du mal à s’habituer aux nouvelles technologies, Kathleen avait encore de la chance car son époque avait une façon de communiquer qui était relativement compatible avec celle du monde moderne. Elle pouvait être déstabilisée par certaines choses mais la plupart du temps, elle s’en sortait à peu près bien. Plus on remontait dans le temps, plus il devait être difficile de s'adapter à ce nouveau monde. Elle se demandait si des portails s’ouvraient parfois suffisamment dans le passé pour craindre de voir débarquer un dinosaure.

« Ca ne doit pas être facile de venir d'une époque si lointaine. Elle parvient à s’adapter ? Remarquez, je m'adapte dans un certain sens, mais dans un autre, je vis toujours dans un château », confia-t-elle avant de secouer la tête face à la proposition de boire un café. « Merci. Je me contente de mes infusions et de mes thés. Je les fait moi-même. Certains ont de grandes propriétés médicinales. »

Elle était contente d’être allée chercher les viennoiseries dans un endroit que sa nouvelle collègue aimait tout particulièrement. Après tout, le but était de lui faire plaisir. Elle avait l'air contente de son nouveau travail et la jeune princesse trouvait cela très important. S'adapter à un nouveau monde n'était déjà pas facile alors cela aidait lorsqu'on se retrouvait à faire un travail qui nous plaisait. Elle remarqua que la jeune femme semblait lorgner les viennoiseries et elle lui fit un sourire. Elle n'avait pas l'intention de la priver de sa gourmandise.

« N'hésitez pas à vous resservir si vous en avez envie. Ils sont là pour ça. Que faisiez-vous avant de venir ici ? »

La jeune fille lui posa des questions au sujet du royaume de Sank et la jeune princesse ne se fit pas prier pour en parler. Elle aimait tellement son pays qu'elle avait toujours été ravie d'en partager les coutumes, même si elle devait reconnaître qu'il arrivait fréquemment que les gens de son époque en soient étonnés. Le royaume de Sank était avant-gardiste et elle avait l'habitude qu'on lui fasse remarquer l'étrangeté de son monde. Le simple fait de pouvoir le gouverner elle-même sans être obligée de se marier était inconcevable pour la plupart des nobles de son monde.

« On peut se tutoyer, ça ne me dérange pas du tout. Il se situe au nord de la France, et possède une frontière avec la Belgique également. Il n'est pas très étendu mais il est assez avant-gardiste. Dans mon royaume, tout le monde apprend à se défendre, hommes comme femmes et d'ailleurs, la plus habile de toutes en dehors de mon père a toujours été ma cousine Rose qui devait être mon garde du corps. Mais je me débrouille plutôt bien moi-même. Nous pensons que chaque membre de notre peuple doit pouvoir manger à sa faim et vivre confortablement. Nous essayons d'être le plus bienveillant possible envers chacun. Avec les enfants du village, j'ai même fondé une sorte de refuge pour soigner les animaux blessés de la forêt. Ils sont nombreux à y participer. »

Halloween

A son époque, l'art de la conversation se travaillait tellement qu'il était difficile pour qui que ce soit de faire un véritable faux pas involontaire et comme celui que Margot venait de faire. Des remarques mal placées, il y en avait, et même plus souvent qu'on ne l'aurait souhaité, mais elles étaient loin d'être involontaires. Il s'agissait plutôt de provocation gratuite, en général, pour mettre mal à l'aise une concurrente ou mettre en avant quelque chose qui ne serait pas à son avantage en faisant passer ça dans les conventions sociales. Mais la jeune diplomate avec la quasi-certitude que sa nouvelle collègue était pétrie de bonnes intentions. Elle avait juste été maladroite.

Il s'avérait pourtant que cette révélation si terrible sur son avenir ne choqua pas Kathleen le moins du monde. Elle n'avait jamais su si elle pouvait y croire, mais maintenant, elle savait que ces rêves qu'elle avait fait peu de temps avant d'arriver dans cette ville étaient réels et prémonitoires comme elle le pressentait. Son regard se teinta de tristesse, mais dans ce monde où elle était maintenant, elle ne les reverrait de toute façon jamais et pourrait encore moins les prévenir de ce qui risquait de leur arriver. Elle était complètement impuissante face à cette réalité et essaya d'oublier sa souffrance avant qu'elle ne s'empare de son cœur et que les larmes ne lui viennent.

« Ainsi donc, c'était vrai. Malheureusement, cela ne fait plus aucune différence aujourd'hui », se dit-elle à voix haute avant de prendre conscience que sa collègue se demandait sûrement de quoi elle parlait. « Voyez-vous, avant mon départ, j'ai eu des visions de l'exécution du roi et de la reine. Il est si facile de se dire que c'est un rêve et de ne pas y prêter plus attention, mais je savais bien qu'il y avait plus que cela. »

Avec tout ça, elle n'avait même pas répondu à sa question sur la vie à l'époque. Elle secoua la tête pour chasser les restes de son sentiment d'impuissance afin d'offrir toute son attention à son interlocutrice. Elle était vraiment trop sensible et c'était une chose qui, déjà à l'époque, ne l’aidait pas vraiment à faire son chemin à la Cour. Heureusement qu'elle avait un rang inaliénable, cela lui ouvrait des portes que très peu de personnes pouvaient se vanter d'avoir. En tant qu'altesse royale, elle n'était pas obligée de flatter le roi et la reine pour conserver son statut à la Cour.

« On s'imagine souvent que la vie de château, c'est merveilleux et que ça donne accès à plein de richesses et d'activités formidables. Mais la vérité, c'est que c'est surtout un endroit où l'on cherche à se faire mousser en tentant de ternir la réputation de son voisin afin de conserver son statut ou d'acquérir un meilleur que celui qu'on a déjà. Je n'ai jamais trop aimé ces jeux de pouvoir, mais heureusement, être une princesse héritière donne lieu à certains avantages qu'on ne peut vous enlever. »

Elle écouta ensuite la jeune fille parlait de sa colocataire dont l'histoire d'origine remontait bien plus loin que celle de Kathleen. Margot essayait de tout son cœur et de toute son énergie de la guider dans ce monde, mais cela ne semblait pas facile. La jeune princesse se disait parfois qu’il aurait mieux valu laisser les gens vivre selon le niveau de socialisation qui était le leur, mais il ne faisait aucun doute que c'était probablement une façon de fonctionner assez difficile à mettre en pratique. Elle se demandait quand-même sur quels critères le vide de ce monde. La logique voudrait que ce soit de la façon la plus commune et la plus pratique pour un maximum de personnes, mais il pouvait être difficile de s'en assurer, sachant que l'on avait que très peu d'informations sur les instigateurs de la situation.

« Je comprends combien la situation doit être déstabilisante pour elle. Si je peux l'aider de quelque façon que ce soit, n'hésitez pas à me le faire savoir. »

Pour ce qu’il s'agissait de ce qu'elle buvait, il était rare quelle fasse autrement que de faire confiance à ses propres décoctions. On avait tellement essayé de la droguer ou de l'empoisonner qu'elle avait appris à se méfier de tout le monde. Évidemment, une pâtisserie ne ferait sûrement pas long feu si elle se mettait à empoisonner ses clients, et Kathleen se dit que ça pourrait valoir le coup de voir ce qu'ils proposaient dans cette pâtisserie. En tout cas, sa nouvelle collègue un peu gourmande semblait y trouver beaucoup de goût.

« Ca vaudrait peut-être le coup que j'aille faire un tour, dans ce cas. »

La jeune fille avait un côté globe-trotteur qui faisait sourire Kathleen. Elle aurait certainement plus ce genre d'occupation si elle n'avait pas eu à s'occuper de son royaume et des relations internationales de celui-ci. Quand elle parla de se rapprocher de ses familles, la jeune princesse sourit en se demandant si son choix de changement de carrière avait été fortement influencé par la découverte d'un lien familial quelconque. Elle trouvait cette façon de procéder des plus touchantes. Elle aurait elle-même été capable d’en faire autant quand il s'agissait de sa famille.

« Madame le Maire, c'est bien ça ? Il me semble avoir entendu que vous étiez de la même famille. »

La mention d'une certaine Blanche-Neige fit se poser question à la jeune princesse. Elle n'avait jamais entendu ce nom nulle part mais il y avait beaucoup de choses qui lui était inconnues dans ce monde basiquement, lorsque l'on communiquait, il était parfois compliqué de se rappeler que les autres n'avaient pas forcément les mêmes références que soi. Le plus simple était de ne pas se fâcher et de poser des questions quand il y avait quelque chose qu'on ne comprenait pas.

« Blanche Neige ? Qui est ce ? Quelqu'un de votre connaissance ? »

Halloween

Si Kathleen faisait partie de la noblesse et qu'elle était une véritable princesse de sang, cela n'empêchait pas qu’elle puisse avoir exactement comme Margot la manie de parler trop. Elle n'allait donc pas lui en vouloir, même s'il était vrai que l'annonce de la perte de la reine et du roi de France et leur façon de mourir était un peu triste à ses yeux. Comme Margot venait d'un autre univers, elle aurait pu douter de ses assertions. Mais la vision qu'elle avait eue de leurs Majestés était si proche de ce qu'elle entendait en ce moment que le doute n'était plus permis.

« Ne vous inquiétez pas, ma fille et moi avons sensiblement le même défaut », reconnut-elle avec un petit sourire penaud. « Beaucoup de courtisans avaient envie d'être proche de la reine, et même du roi, puisque c'était le moyen d'avoir de nombreux privilèges et croyez-le ou non, la majorité des courtisans sont vraiment intéressés. la sincérité n'est pas vraiment de mon époque. Mais en ce qui me concerne, j'ai toujours préféré forger des liens plus solides et je considérais vraiment la reine comme une amie. Quant au roi, j'ai pu constater sa bienveillance et également son amour pour sa femme puisqu'il a tenu à spécifier dans notre accord international qu'en cas de problème, nous acceptions d'accueillir son épouse dans notre pays. J'avais pour eux deux une grande tendresse »

Le roi avait notamment été particulièrement gentil avec la jeune princesse après le décès de son époux et ce, malgré ces difficultés à exprimer ses sentiments. Elle avait appris, peu avant de devenir veuve, que le roi avait de tendres sentiments pour elle et elle en était touchée, même si son cœur était réservé à Paul. Elle ne pouvait s'empêcher de se demander s'il s'ouvrirait à un autre, un jour. Mais il n'était pas question de dévoiler les confidences du roi à qui que ce soit. Elle l'avait seulement fait à ses amis les plus proches mais elle ne voulait pas salir la mémoire de cet homme en laissant supposer qu'il aurait pu tromper son épouse. Margot attira son attention sur autre chose en lui demandant si elle était souvent à la Cour du roi.

« J'ai passé une grande partie de ma vie à partir de mes dix-sept ans. J'étais l'ambassadrice et je ne quittais le Royaume de France que lorsqu'il fallait que je retourne à Sank, ce qui n'est pas arrivé souvent. Ma plus longue absence a été pour mon voyage de noces et encore ne me suis-je pas absentée vraiment longtemps. Il était capital de maintenir les relations pour le traité entre nos deux royaumes. »

Kathleen n'aurait jamais insinué que la jeune femme pouvait avoir obtenu sa place à cause du lien qu'elle entretenait avec Madame le Maire. Bien entendu, dans son monde, les proches des gouvernants avaient tous un titre ou une position en rapport. Mais elle avait rapidement compris que dans ce monde, c'était mal vu, même si cela arrivait aussi. De toute façon, il n'était pas dans les habitudes de la jeune princesse de penser à mal vis-à-vis des gens, elle avait plutôt tendance à se dire que les choses étaient comme elles le devaient et à s'adapter quand ce n'est pas le cas. Kathleen aimait à croire en la bonne nature des gens.

« Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire. Elle a l’air d’être forte et pleine de sérieux en ce qui concerne son travail. Elle a clairement les épaules pour gérer ce genre de situation. Je pense que vous devez être vraiment fier d'avoir quelqu'un comme elle dans votre famille. Elle semble du bois dont on fait les reines. »

C’était innocemment que Kathleen avait mentionné Blanche Neige comme pouvant être une connaissance de sa nouvelle collègue. Elle n'avait pas compris qu'il s'agissait d'un personnage d'une histoire de conte mais puisqu'elles venaient de mondes différents, il était tout à fait possible que ce conte n'existe pas dans le monde de Kathleen et en plus, compte tenu du fait qu'elle venait d'une époque très ancienne, si ce conte existait dans son monde, il n'avait peut-être pas encore été écrit au moment où elle vivait là-bas. Mais la description la fit sourire et elle comprit aussitôt la comparaison.

« Ce n'est pas un conte que je connais, mais il ne fait peut-être pas partie de mon monde. En tout cas, je pense effectivement que nous nous ressemblons et j'imagine qu'il pourrait y avoir une Blanche-Neige ici, puisqu'il existe des gens provenant d'univers très variés. Mais je ne suis pas sûre que les oiseaux lui répondront ici. »

Halloween

Si Kathleen venait d'une époque où les gens avaient commencé à grogner et à se plaindre de la faim et du dénuement, les choses n'étaient pas encore allés très loin au moment de son départ. Elle ne connaissait pas tous les détails de l'histoire et n'avait pas vécu tous les événements en rapport avec les évolutions de gouvernement qu'il y avait eu dans son propre futur. Cette histoire de brioche devait en faire partie car elle n'avait absolument aucune idée de ce dont la jeune fille était en train de parler, mais elle ne lui fit pas de reproches et ce contenta de sourire gentiment. Ce n'était pas sa faute si Kathleen n'avait pas toutes les références historique de son époque.

« Je dois reconnaître ne pas avoir la moindre idée de ce dont vous voulez parler. Marie-Antoinette a toujours été très gentille, mais elle n'avait pas le sens de la mesure. J’ai tenté à plusieurs reprises de lui faire comprendre que son peuple attendait autre chose que ce qu'elle était prête à lui donner, mais je crois qu'elle n'était pas prête à l'entendre. C'est bien triste car cela ne pouvait entraîner que son déclin. »

Kathleen avait été formée depuis les prémices de son adolescence aux soins à porter à une population que l'on dirige. Sank avait la réputation d'être un pays ou les royautés tenaient tout particulièrement compte des besoins des personnes à leur service et la rousse avait donc appris que ce n'était qu'en prenant soin des personnes qui vivaient dans son royaume qu’elle serait une reine digne de ce nom, le genre de principe qu'elle avait essayé de partager avec Marie-Antoinette, mais même si les deux femmes avaient le même âge, Kathleen avait l'impression que dans sa tête, la reine de France était infiniment plus jeune.

« Oui, ma famille a toujours pensé que c'était important de conserver de bonnes relations avec la France. Et je comprends pourquoi. Ils étaient nos plus proches voisins et une force militaire et politique particulièrement forte. Leur influence en Europe était grande », répondit-elle avant de sourire pensivement en se rappelant son voyage de noces. « Nous sommes tout simplement rentrés à Sank. Nous avons fait un magnifique voyage à travers le royaume en profitant de chaque instant et en découvrant ou redécouvrant les paysages aussi divers que merveilleux que l'on voit dans mon pays. Nous avons même descendu une montagne sur une planche en bois, en glissant sur la neige. C'était magique. »

Ses pensées s'orientèrent ensuite vers sa fille dont la jeune femme lui demandait si elle était venue ici avec elle. Contrairement à son époux qui était décédé, sa fille était bien en vie et elle était heureuse de pouvoir partager avec elle sa vie dans ce nouveau monde. Il lui aurait été très difficile de partir sans elle, d'autant qu'elle était encore très jeune. Elle venait de perdre son époux et elle ne savait pas si elle s'en serait remise de perdre également sa fille à cause d'un vortex. Mais elles étaient si souvent ensemble qu'il y avait peu de risques pour qu'un vortex happe la mère et pas la fille. Pour éviter tout risque supplémentaire, Kathleen s'était de toute façon accrochée fermement à son enfant au moment où elle avait été embarquée.

« Feena à deux ans et elle est évidemment venue avec moi. C'est une petite fille merveilleuse et elle commence déjà à maîtriser quelques-uns des comportements qui conviennent à une princesse. Il est touchant de voir à quel point elle se donne à fond pour me faire plaisir et me rendre fière. Je crois que je ne pourrais pas être plus fière de ma fille, en réalité. Mais j'avais l'habitude de l'emmener partout avec moi et il m'est difficile de ne plus pouvoir le faire. »

Kathleen était persuadée qu'une personne devait être fière d'avoir quelqu'un comme Regina dans sa en famille. Elle lui trouvait une force extraordinaire et un caractère étonnant et à toute épreuve. Pour autant, elle n'était pas certaine que cette femme soit facilement capable de se confronter aux responsabilités qui étaient les siennes. Elle les assumait avec brio et avec une force extraordinaire, mais Kathleen avait le sentiment qu'elle était plongée dans un monde pour lequel elle n'avait rien choisi et elle espérait que la maire y trouve quand même du bonheur. Sa nièce semblait en tout cas très fière d'elle et elle avait raison de l'être.

« Je pense que je serais très fière aussi si je faisais partie de sa famille. Je vous comprends. »

Il était difficile pour Kathleen de connaître des histoires qui n'existaient pas encore à l'époque d'où elle venait. Elle avait commencé à se documenter pour essayer de comprendre les références de ce monde, mais cela prenait un certain temps. La jeune femme se demandait si l'ancienne princesse avait réussi à nouer des connaissances dans ce monde. Kathleen n'allait pas évoquer le travail où Margot savait très certainement combien elle avait réussi a rencontré des gens et être à l'aise dans son devoir. Il y avait au moins un autre exemple qui pouvait montrer à quel point la princesse était capable de se tourner vers les autres quand c'était nécessaire.

« J'ai rencontré une jeune sorcière, Melinda Warren. Elle a une petite fille qui est presque de l'âge de la mienne, à quelques mois près je pense. Les petites ont sympathisé et nous aussi, par voie de conséquence. C'est une personne vraiment intéressante et je pense qu'il doit y en avoir beaucoup dans ce monde. Il y a aussi ce jeune archéologue qui voudrait aller déjeuner avec moi et ma fille, non dîner, c'est comme ça qu'on dit le soir non ? »

Halloween

Kathleen avait toujours prévenu Marie-Antoinette que si elle ne faisait pas plus attention à son peuple, il se retournerait un jour contre elle. La grogne dont sa jeune collègue parlait, elle avait déjà pu l'entendre et la remarquer à de nombreuses reprises. Cela n'avait pas encore atteint les proportions décrites par la jeune femme, mais même si Kathleen venait d'un autre monde, quelque chose lui disait que c'était ainsi que les choses s'étaient passées aussi dans son monde. Cela lui semblait d'autant plus évident que le chemin que Leurs Majestés suivaient, elle en avait perçu une bonne partie dans ses rêves.

La conversation s'orienta ensuite vers sa chère petite qui lui manquait terriblement. Elle avait toujours du mal avec le fait d'en être séparée, même si ce n'était pas très longtemps. Une journée, cela lui semblait le bout du monde. Heureusement qu'elle avait pu lui trouver une nourrice au château. Elle sentait que cela parlait d'une certaine manière à son interlocutrice, mais elle ne savait pas exactement de quelle façon et en sentant que c'était un sujet un peu douloureux, elle préféra la laisser y venir si elle le souhaitait un jour. En attendant, elle réorienta la conversation sur la Maire, qui était aussi la tante de la jeune femme.

« Je vous comprends. J'ai appris tout ce que je sais de mon père et de ma mère et il me serait extrêmement précieux de les avoir ici aujourd'hui. Malheureusement, je doute que cela se produise. Mais je pense qu'avec une personne comme votre tante, le travail ici risque d'être particulièrement enrichissant.{/b] »

Lorsque Kathleen partagea avec sa nouvelle collègue l'invitation de Daniel Jackson à venir manger avec lui, elle n'avait pas pensé qu'il pourrait s'agir d'un rendez-vous amoureux. Mais au fond, peut-être était-ce ainsi que cet homme le voyait et elle n'y avait tout simplement pas songé. La pensée qu'il pourrait vouloir la séduire fit rougir Kathleen jusqu'aux oreilles. Au fond, c'était une possibilité, mais elle ne l'avait tout simplement pas envisagé. Alors qu'elle était en train d'y réfléchir, la jeune femme lui demanda si cela lui plairait d'aller déjeuner un jour en sa compagnie. Pour le coup, elle retrouva son sourire.

« [b]Ho évidemment, je serai enchantée de passer du temps avec vous en dehors des heures de travail. Je suis désolée d'avoir mis un peu de temps à réagir, mais c'est que… je n'avais absolument pas réfléchi à la possibilité que cet homme veuille me courtiser. Vous pensez que c'est possible ? Cela dit, il a demandé à rencontrer ma fille à cette occasion. Un homme courtiserait-il une jeune femme en compagnie de sa petite fille ? Après tout, cela ne me paraît pas insensé qu'il veuille connaître ma fille, si ses intentions sont de donner suite de manière romantique, vous ne croyez pas ? »

Halloween

Même si elle n'avait pas encore pu retrouver sa mère, il semblait à Kathleen que cette femme avait la chance d'avoir un bon nombre des membres de sa famille auprès d'elle dans cet endroit. C'était déjà plus que ce que Kathleen pouvait avoir, mais avec la petite Feena, elle estimait avoir l'essentiel. Garder sa fille auprès d'elle était infiniment plus capital que n'importe quel autre membre de la famille. Kathleen s'estimait capable de supporter infiniment dans la mesure ou son enfant n'était pas séparée d'elle. Pour le moment et probablement pour toujours, elle était ce que Kathleen avait de plus précieux.

Mais cela devait être agréable aussi pour sa collègue d'avoir son cousin. A priori, lui aussi était un jeune, et si Margot était comme Kathleen, elle allait vouloir le protéger de tous les maux. Elle savait pourtant qu'on ne pouvait absolument protéger quelqu'un de tous les maux du monde. Et encore pouvait-elle protéger sa fille un peu plus tant qu'elle était encore une très jeune enfant. Mais plus tard, il était évident qu’elle en viendrait à devoir se protéger elle-même avant tout, une leçon que la mère de Kathleen avait apprise trop amèrement au moment de la naissance de sa petite fille.

« Vous avez un cousin plus jeune ? Voilà qui doit vous donner une sensation de responsabilité n'est ce pas ? Pour ma part, ma cousine est plus âgée que moi et mon cousin est de mon âge, mais je ne suis pas sûre qu'ils se sentiraient bien ici. Quoique. Daniel est un artiste et je gage qu'il trouverait des moyens de peindre partout où il se trouve. Et je suppose que ces penchants particuliers seraient mieux acceptés à cette époque qu'à la mienne. »

Kathleen avait très peu connu cette habitude qui consistait à ragoter à propos des relations personnelles et intimes des autres. Elle se souvenait des histoires qu'elle avait partagées avec ses amis quand elle était encore dans son monde et ça ressemblait effectivement un peu à ça. Finalement, elle décida que Margot ferait une bonne amie et qu'elle pouvait lui confier ce genre de choses. Et puis, elle avait besoin de conseils et cette personne était probablement là mieux à même de les lui donner. Une chose était sûre, Kathleen, qui avait connu son prince à 17 ans et n'avait jamais regardé ailleurs, n'y connaissait rien dans le domaine de la séduction amoureuse.

« Il est venu à la mairie pour discuter d'un arrangement en ce qui concernait un chantier de fouilles. Il est archéologue. Et nous avons discuté. J’ai été engagée par la mairie parce que j'étais l'ambassadrice de mon peuple à Sank, et il a souvent service de diplomate pour des accords inter-espèces. Nous parlons tous les deux plusieurs langues et nous nous sommes découvert quelques points communs. Je lui ai dit que j'avais une fille et il a proposé que nous nous rencontrions autour d'un repas. »

Halloween

Voilà qui était bien curieux. Ce garçon était plus jeune qu'elle, mais à l'origine, il était donc plus vieux. C'était assez étrange de rencontrer les gens en provenance d'une époque différente. Cela dit, elle n'aurait pas souhaité que Rose lui revienne à l'âge d'un enfant. Il ne faisait nul doute que ce serait un autre genre de défi que Feena à relever. mais apparemment, ce n'était pas un souci pour la jeune femme dont le cousin ne semblait pas lui apporter trop de difficultés, même à un âge plus jeune. C'était tant mieux pour elle et c'était une bonne chose de sa part de l'accueillir dans sa maison. C'était plutôt généreux comme attitude.

« En tout cas, c'est gentil de vous occuper de lui. Je suppose que ça doit lui faire plaisir d'avoir un endroit où il ne dépende pas de ses parents. Les jeunes sont souvent contents de s'éloigner un peu du noyau familial. »

Elle rit en se rendant compte que Margot n'avait pas du tout compris de quoi elle parlait à propos de Daniel. Elle avait déjà remarqué que les personnes de ce monde faisaient preuve de quelque peu moins de subtilités qu’à son époque et il était clair qu'elle n'exprimait pas de façon très précise les raisons pour lesquelles son cousin avait pu être mal vu, y-compris par son amant. Il n'avait jamais eu de réel problème parce qu'il était sous la protection du roi de Sank, mais elle savait que ses mœurs ne devaient pas trop être mis en avant en public. Daniel était parfois un peu trop démonstratif pour sa bonne sécurité.

« Non, je ne parle pas du tout de son côté artistique. Daniel a toujours eu une préférence pour les hommes. Ce n'était pas forcément quelque chose à avouer à la cour du roi de France, même si le roi lui-même ne le lui a jamais directement reproché. Cela dit, je suppose qu'il ne s'est jamais trop inquiété de ce genre de choses, tant que cela ne dérangeait pas l'ordre de sa cour. »

Elle avait une profonde amitié pour Louis XVI. C'était un homme gentil et cultivé avec qui elle avait eu du plaisir à échanger et dont elle avait découvert qu'il avait pour sa femme un véritable attachement. Elle avait du respect pour lui et elle avait grandement apprécié qu'il ne chasse pas directement Daniel de sa cour. Pour ce qui était de ses parents, ils prenaient leur neveu, tel qu'il était sans se soucier de ses préférences. Elle sourit pensivement alors que tout ça lui revenait à l'esprit, juste avant que ne se pose la question de Daniel. Elle n'avait pas pensé qu'elle était en train de se faire courtiser mais peut-être qu'elle était simplement trop naïve. Ses cousins et ses amis le lui avaient déjà fait remarquer.

« Pas après notre première rencontre, non. Mais nous avons discuté à de nombreuses reprises, professionnellement et un peu personnellement également. Finalement, il a eu envie de connaître Feena et de me montrer ce que c'était qu'un restaurant. Je dois reconnaître que tout cela est bien mystérieux pour moi et je suis bien innocente sur le chapitre de la séduction. Avec mon époux, les choses avaient semblé si naturelles. Mais j'ai l'impression qu’ici, tout est un peu différent et étrange. Ce doit être que je n'ai guère l'habitude des choses de ce monde. Il m'a parlé d'un endroit en ville, je crois que je l'ai noté quelque part, si tu veux. Pour ce qui est de tout te raconter, eh bien tu m'aideras peut-être à décrypter comment ça s'est passé. »

Halloween

Même si elle ne connaissait pas son cousin depuis longtemps, Kathleen comprenait parfaitement qu'elle veuille assurer sa sécurité autant qu'elle le pouvait. Ce n'était qu'un enfant et à partir de cette constatation, il était évident qu'il avait besoin de protection. Bien entendu, il ne semblait pas particulièrement en danger puisqu'il vivait avec sa famille. Mais lorsqu'il avait envie de fuir comme cela pouvait être le cas de n'importe quel adolescent, c'était une bonne chose qu'il ait quelqu'un de confiance vers qui se tourner. Kathleen comprenait complètement que Margot veuille prendre ce rôle.

« Je ferais pareil à votre place. Et je suis sûre que sa mère préfère le savoir avec vous plutôt qu'à vagabonder dans la rue. »

Daniel avait été considéré comme un original pendant des années et des années à la cour de France par la plupart des courtisans, et même par le roi on personne. Même si celui-ci ne l'avait jamais empêché de vivre sa vie comme il l'entendait, et même si ce silence associé à son statut de prince lui avait permis de vivre à peu près paisiblement de tout temps, cela ne changeait pas le fait que ce n'était pas réellement un comportement qui lui valait l'approbation générale à la cour de France. Ce qui était vrai aussi, c'était que Daniel se moquait complètement de recevoir l'approbation de ces concitoyens.

« En effet, non. Mais puisque le roi et la reine ne lui en tenaient pas rigueur et qu'en tant que mon cousin, il était de sang royal, on l'a jugé mais on ne l'a jamais réellement embêté avec ça, ce qui l'arrangeait. Il se moquait bien de l'opinion des personnes qui l'entouraient et il préférait vivre sa vie à fond. J’ai toujours eu beaucoup de tendresse pour lui. »

Elle eut un sourire empreint de cette tendresse sur le visage, avant que les deux femmes ne se mettent à discuter du rendez-vous que la jeune princesse avait avec le docteur Jackson dans un restaurant de la ville. Kathleen était rassurée de se dire qu'elle avait quelqu'un qui s'y connaissait un peu plus qu'elle pour discuter de ce qui allait se passer. Elle n'avait pas la moindre idée de la façon dont on se courtisait à cette époque et elle était persuadée qu'elle avait de grands risques de commettre un faux pas. Margot, pour sa part, avait l'air particulièrement enthousiaste et curieuse de la façon dont les choses étaient organisées.

« Peut-être que tu n'as pas beaucoup d'expérience, mais toi, au moins, elle date d'une période récente. Pour ma part, je n'ai pas connu ce genre d'expérience depuis la mort de mon époux et certainement pas dans un monde étrange comme celui-ci. Et j'ai tellement peur de commettre un impair. Je t'avouerais que je ne me souviens plus du tout du nom du restaurant. Il se situe dans le centre-ville, je crois. Mais c'est lui qui l'a choisi. D'ailleurs, j'en aurais été bien incapable. Je pense à quelque chose. Que doit-on faire si on se fait courtiser alors qu'on en a pas envie ? Je ne voudrais pas blesser cet homme s'il s'avère qu'il veut aller plus loin mais que je ne me sens pas prête. »

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Kathleen était persuadée que l'homosexualité était bien plus présente dans les cours d'Europe que ce qu'on voulait bien faire croire. Le fait était que, quelques fussent les habitudes et les mœurs de chacun des membres de la cour, personne n'en était jugé et tout le monde l'était en même temps. Fondamentalement, il était possible de faire tout et n'importe quoi, pourvu que personne ne le sache jamais. Le plus gros souci que Daniel avait, c'était son incapacité à dissimuler son attitude de dragueur invétéré. Mais Kathleen n'était pas certaine que ce soit vraiment un problème au fond. Daniel trouver un malin plaisir dans la provocation et tout particulièrement, en ce qui concernait Matthew.

« A vrai dire, il avait un esprit que l'on qualifierait aujourd'hui d'artistique, et je crois que d'une certaine façon, il aimait bien choquer et provoquer des réactions en draguant et en flirtant avec les jeunes messieurs même s'il savait qu'il n'avait aucune chance. Je crois même qu'il était encore pire lorsqu'il savait pertinemment qu'il n'avait absolument aucune chance. C'était sa façon de s'amuser », dit-elle simplement en haussant les épaules.

Elle avait toujours été plutôt amusée par le comportement de son cousin et elle savait que tout le monde, à la cour de Sank, était plutôt amusé par son attitude que scandalisé. En France, les réactions étaient plus pudibondes, mais cela semblait amuser follement son cousin. Comme ce n'était pas le diplomate né un personnage important, il n'avait pas les mêmes devoirs que sa cousine et ceux qui désiraient l'ignorer pouvait le faire en toute liberté. Daniel était probablement plus libre de ses mouvements et de son attitude que Kathleen ne l'avait jamais été.

Mais de ce fait, elle n'avait jamais eu vraiment l'occasion de flirter. Elle avait été un peu courtisée par Paul, mais il n'avait pas fallu longtemps avant de comprendre que les sentiments qu'ils avaient l'un envers l'autre était sincère. S’il ne s'était pas marié tout de suite, c'était uniquement parce que le travail de diplomate et la mort prématurée du Roi de France les en avaient empêchés et personne ne leur avait reproché la naissance pourtant hors mariage de la petite Feena. Mais dans ce monde moderne, la séduction et les jeux de l'amour étaient tout à fait différents et elle n'y connaissait rien. Déjà innocente de base, c'était encore plus vrai ici et ça ne lui ferait pas de mal et avoir quelqu'un avec qui en parler.

« Je dois avouer que ce monsieur ne m'a pas fait du tout l'impression d'être le genre à se montrer inopportun avec une dame. Mais je dois l'avouer, je suis relativement nerveuse à cause du fait que je ne sais rien de ce genre de jeu et de la façon dont ils sont gérés dans ce monde. As-tu déjà reçu des attentions dans ce genre de moments qui ne te convenaient pas ? »

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